Voici ci-dessous le compte rendu écrit de la dernière conférence du Club IES (voir l’annonce) sur les grands enjeux géopolitiques du 21ème siècle. Je précise que cet écrit n’engage que moi, et ne reflète que ma compréhension des propos de l’orateur. Vous pouvez aussi visionner cette vidéo d’Alexandre Melnik qui résume son propos.
Les grands enjeux géopolitiques du 21ème siècle
Animé par Alexandre MELNIK
Conférence organisée le 25 octobre 2012 à 19H30
Par le Club IES de l’IAE de Paris Alumni
Intervenant : Alexandre MELNIK
Alexandre MELNIK est professeur associé de géopolitique à ICN Business School Nancy – Metz. Ancien diplomate à l’ambassade de Russie à Paris, PHD du MGIMO (Institut des Relations Internationales de Moscou), il est également conférencier international (Conseil Européen, UNESCO, Assemblée Nationale, Sciences Po, universités, business schools et « think tanks » en Chine, aux Etats-Unis, au Canada, en Russie, etc). Auteur de nombreuses publications et interventions dans les media sur les problématiques géopolitiques (Le Monde, Le Figaro, Revue Défense Nationale, Politique Internationale, Les Echos, BFM TV et radio, France 24, etc), ainsi que du livre autobiographique « Itinéraire d’un diplomate franco-russe » (L’Harmattan, 2009). (voir son profil LinkedIn) Il s’exprime souvent sur les enjeux géopolitiques du 21ème siècle.
La globalisation est en marche
L’intervenant a fait une présentation extrêmement vivante, avec un fil conducteur suivant : la globalisation est en marche. Plutôt que de la subir, il faut s’y intégrer pour bâtir au mieux notre avenir ! Au passage il a écorné l’attitude de la France en pointant les boulets que nous trainons aux pieds et qui nous ralentissent considérablement dans la compétition mondiale.
La globalisation est inéluctable
M. Melnik a utilisé le mot anglais « globalisation » plutôt que le mot « mondialisation », qu’il trouve trop connoté négativement. Pour lui c’est un phénomène inéluctable dont la genèse remonte à l’antiquité. Il l’a définie comme « a network of nexus, peoples, places and ideas ».
La globalisation s’est imposée en trois temps :
– Elle s’est ouverte au monde communiste suite à la chute du mur de Berlin.
– Ensuite, elle a été accélérée par la révolution numérique, qui abolit les frontières géographiques et mentales.
– Enfin, elle voit le monde occidental perdre son monopole de l’histoire et de la modernité. Ce rôle moteur est maintenant pris par les nouveaux pôles d’excellence que sont l’Inde, la Corée du Sud, le Brésil, la Turquie, … Le parallèle avec le déclin de l’Empire Romain est évident.
Le XXIème siècle ne sera pas Occidental
Selon M. Melnik le XXIème siècle ne sera pas Occidental. Mais il n’y a pas de fatalisme. Et le monde Occidental pourrait garder son rôle s’il savait se remettre en cause, se réinventer, retrouver sa créativité.
Au sein du monde Occidental les États-Unis sont mieux placés que l’Europe pour répondre à ce défi. L’orateur a illustré cette idée par une anecdote significative. Lorsqu’il a visité le musée de l’immigration à New-York il a lu cette citation d’un immigrant « Avant de venir à New-York je pensais que les rues étaient pavées d’or. Quand je suis venu j’ai compris trois choses : qu’il n’y a pas d’or, que les rues n’étaient même pas pavées. Mais surtout que c’est à moi de les paver ». Les Etats-Unis sont à l’image de cette position très volontariste. Cette fédération a la force de se réinventer. D’ailleurs Obama a été élu car il a su incarner cet espoir.
Dur envers l’Europe
L’intervenant a eu des mots durs envers l’Europe. Il s’est demandé si l’on n’assistait pas actuellement à un « suicide de l’Europe ». L’Europe implose faute de vision claire. La crise de la dette est une sublimation de la crise des valeurs qu’elle vit face aux enjeux du XIXème siècle. Le modèle démocratique est remis en cause à travers le monde. Et le meilleur exemple de cette remise en cause est apporté par la Chine qui n’est pas démocratique, mais qui réussit notamment par ce qu’elle a des objectifs, une lisibilité et une visibilité. Autant de choses qui manque à l’UE.
La France se trompe de siècle
La France, avec ses velléités de démondialisation, se trompe de siècle. Imaginer que c’est possible revient à nier les courbes de l’histoire ; revient à verrouiller les jeunes dans une sorte de sinistrose ; et prouve surtout un réel manque de confiance en soi ainsi qu’un rejet des autres.
La France ne peut pas se démondialiser tout comme le nuage de Tchernobyl ne peut pas s’arrêter à la frontière. Ceux qui pense cela, voient la France comme une île et caressent des rêves illusoires. On gagne en s’adaptant et non en se repliant.
M. Melnik a cité Raymond Aron « la France met l’accent sur l’égalité au détriment de la liberté ». Les Français préfèrent l’analyse à la synthèse. L’analyse opère un découpage en morceau d’une problématique, ce qui ne permet pas d’invitation à l’action, ce qui peut être une béquille intellectuelle.
La globalisation du politique est moins visible
Dans le mouvement de globalisation, il faut distinguer ce qui est du ressort de l’économie et ce qui est du ressort du politique. Si la globalisation économique est simple et visible de tous, le phénomène de globalisation du politique est moins visible. Il est dicté par des institutions supranationales qui reposent sur deux éléments : valeurs et identités. La peur d’une globalisation qui gommerait les identités et qui mènerait vers une sorte d’uniformisation n’est absolument pas fondée. On voit au contraire ressurgir les identités nationales avec force. Et l’intervenant a surpris tout le monde en affirmant que le nouveau mot d’ordre des ingénieurs indiens étudiant l’informatique aux États-Unis est BtoB … ce qui ne signifie pas « Business to Business » mais « Back to Bengalore ! ». Ils veulent retourner « au pays », retrouver leur culture. Et les plus talentueux d’entre eux, recruteront même… leurs anciens professeurs !
M. Melnik a terminé son intervention en évoquant le printemps arabe. Il a fustigé ceux qui disent qu’il est mieux de maintenir des régimes autoritaires pour ne pas tomber dans l’islamisme. Et ce dernier de s’interroger « En quoi ces pays seraient génétiquement inapte à la démocratie ? La France a bien mis cent ans pour passer de la Révolution à la Troisième République ». Et on sent bien que cet ancien marxiste pèse ses mots quand il parle de Liberté.
Conclusion
Après cette présentation des enjeux géopolitiques du 21ème siècle, il l’a rappelé en conclusion : C’est à nous à créer notre propre avenir. C’est à nous de paver la route de notre futur. C’est à nous d’être acteur de notre propre changement. L’action est impérative. A l’heure actuelle, le changement est la condition nécessaire de la stabilité !
[Inscrivez-vous aux prochaines conférences du Club IES. D’autres conférences traitent des grands enjeux géopolitiques du 21ème siècle]Jérôme Bondu
Directeur d’Inter-Ligere société de conseil en veille et intelligence économique