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Gestion des risques

A lire : Surmonter les crises, de Raphaël de Vittoris

By 19 janvier 2025No Comments
Surmonter les crises

J’ai lu « Surmonter les crises – idées reçues et vraies pistes pour les entreprises » de Raphaël de Vittoris. L’ouvrage est très bien écrit. Il se lit rapidement. L’auteur a mis en exergue les cinq grandes idées reçues dans la gestion de crise.

Raphaël de Vittoris est directeur de la gestion des risques et de la gestion de crise chez Symbio. Il est aussi professeur & chercheur associé en stratégie, organisation, management, gestion de crise et communication de crise à l’IAE de Clermont-Auvergne.

Avertissement : J’ai essayé de reprendre fidèlement quelques éléments majeurs du livre. Cette note de lecture ne reflète pas mes idées, et encore moins celles des structures avec lesquelles je travaille, mais les idées de l’auteur. Les phrases entre guillemets sont issues du livre.

Introduction : Surmonter les crises

Dans l’introduction, Raphaël de Vittoris rappelle notamment ce qu’est une crise. Il y a quatre caractéristiques dites « cœur » :
– La rupture de continuité des activités usuelles.
– L’incertitude quant à la dynamique et la gravité de la situation.
– La contrainte temporelle de gestion.
– L’ambiguïté.

Idée reçue #1 – Les signaux faibles sont détectables avant la crise.

Dans cette première partie, l’auteur critique le concept de signal faible. Nicolas Moinet et d’autres ont eux aussi relevé que le concept de signaux faibles est bancal. Souvent, c’est à postériori que l’on déclare qu’un signal était « faible ». Le recul du temps permettant de discriminer facilement ces fameux signaux faibles (bais de narration). Mais dans le fil de l’action, face à la surabondance informationnelle, il est impossible de déclarer qu’un signal est faible. Raphaël de Vittoris souligne d’ailleurs, non sans humour, qu’il serait déjà important de bien savoir traiter les signaux forts !

Sur les signaux faibles, on pourra consulter le compte rendu du Club utilisateur d’Esprits Collaboratifs / Curebot. Ou le compte rendu « Les signaux faibles, nouvelles grilles de lecture du monde ».

Idée reçue #2 – Un leader chef de guerre est essentiel

Pourquoi se fier à un chef de guerre est dangereux ? « Un leadership de crise incarné par un individu unique soumet toute l’organisation, et même les parties prenantes, à l’expression la plus directe de ses biais cognitifs ». En fait la bonne solution réside dans une résolution en groupe, qui permet une dynamique plus démocratique qui dictatoriale.

Idée reçue #3 – La temporalité des crises suit un schéma directeur.

L’auteur démontre qu’il n’y a pas de schéma classique de crise, avec des signaux faibles, une croissance, un pic … Chaque crise est unique. Raphaël de Vittoris enfonce même le clou : trop de préparation tue l’action. Plus l’organisation se prépare, plus elle s’ossifie, moins elle est agile.

Mais ceci dit, il explique que le séquençage, même artificiel, offre aux gestionnaires de crise des fenêtres / possibilités d’action. C’est pour cela que l’enseignement d’un schéma directeur est quand même utile.

Idée reçue #4 – La planification est l’élément pivot de la réaction à la crise.

L’auteur pose la question en ces termes : « Comment peut-on préparer avant l’heure des décisions portant sur un événement imprévisible aux magnitudes et dynamiques inconnues ? ». Il va jusqu’au bout du paradoxe : « La préparation méthodique de traitement de situations, d’options et d’informations en temps de paix réduit paradoxalement la compréhension des situations et l’identification d’options et d’informations vécues en temps de crise ».

Néanmoins là encore, il souligne que la pratique de la planification a quand même du bon. Il détecte trois points positifs :
– Cela permet une économie des ressources cognitives.
– Cela permet un avantage pédagogique significatif.
– Enfin, cela permet d’établir une première ligne de réponse.

Il réconcilie l’action et l’intuition, l’adaptabilité et l’agilité (lire à ce propos le compte rendu du livre de Vincent Desportes « Entrer en stratégie » https://www.inter-ligere.fr/entrer-en-strategie-du-general-vincent-desportes/ ainsi que la vidéo de sa conférence au Club IES https://www.inter-ligere.fr/compte-rendu-video-du-club-ies-general-vincent-desportes/ ).

Idée reçue #5 – Le retour d’expérience est gage de progrès.

Raphaël a conscience que toucher au sacro-saint « retour d’expérience » tient de l’anathème auprès des praticiens de la gestion de crise. Tant la pratique est sacralisée. Il justifie en ces termes son point de vue : « Les retours d’expérience, tel qu’ils sont le plus souvent réalisés, peuvent être considérés comme une production composite influencée par des biais individuels et collectifs, permettant de se raconter une histoire collectivement admise générant un plan d’action globalement accepté ».

Il ne propose pas d’abolir le retour d’expérience, mais de le réinventer. Comment ? Voici quelques pistes :
– Orienter les prises de parole, durant le retour d’expérience, sur des faits. Et s’assurer que l’interprétation des faits soit collectivement admise.
– « Les analyses doivent aborder les points de faiblesses à la fois techniques, organisationnelles et personnelles ».
– Veiller à ce que l’autorité ou le grade ne pervertisse pas les analyses.
– Accepter que l’on ne puisse pas avoir compris une situation.

Conclusion : Conseils pour bien surmonter les crises

En conclusion, Raphaël de Vittoris apporte quelques conseils finaux :
– Accepter l’impossibilité de tout comprendre.
– Repousser tout argument d’autorité.
– Privilégier une compréhension holistique des événements.
– Développer une « ceinture de sécurité cognitive ».

« Surmonter les crises – idées reçues et vraies pistes pour les entreprises » de Raphaël de Vittoris est édité chez Dunod en 2021.

Livre intéressant pour avoir une lecture critique des mécanismes de gestion de crise.

Sur le même sujet, on pourra consulter ces deux anciens comptes rendus :

Jérôme Bondu

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