J’ai lu « La bombe », bande dessinée de Didier Alcante, Le Bollée et Denis Rodier. L’ouvrage se présente comme « l’incroyable histoire vraie de la bombe atomique ». C’est un magnifique ouvrage d’environ 500 pages, en noir et blanc, avec un dessin très graphique.
Histoire vraie de la bombe atomique
L’histoire est passionnante et met en avant quelques personnages centraux comme Szilard, Fermi, Oppenheimer, le général Groves, Truman, ainsi qu’une famille japonaise. On ne peut que frissonner devant les enjeux, drames, destructions et plus généralement les destins des protagonistes.
- Les habitants des villes d’Hiroshima et Nagazaki, évidemment.
- Les savants, en grande partie européens, qui ont travaillé à construire la bombe.
- Les Américains et notamment les militaires.
La dissuasion nucléaire
Le sujet central de l’ouvrage est la stratégie de dissuasion nucléaire. La thèse des auteurs est qu’un test grandeur nature sur une zone uniquement militaire du Japon aurait certainement suffi à faire capituler l’empire du soleil levant. Empire qui de toute manière était acculé à une défaite inéluctable. La démonstration de force liée à la possession de la bombe, conjuguée à l’invasion de la Mandchourie par l’URSS aurait suffi.
Les raisons de l’utilisation de la bombe sur les villes japonaises
L’ouvrage pointe plusieurs raisons qui ont présidé à l’utilisation de la bombe sur deux villes fortement peuplées. J’en présente quatre :
- Première raison : le phénomène d’escalade d’engagements. Des sommes immenses ayant été investies, s’arrêter aurait été un échec.
- Deuxième raison : L’action jusqu’au-boutiste des militaires, personnalisée par le général Groves.
- Troisième raison : L’indifférence de certains décideurs américains. La BD illustre cet argument avec au moins deux exemples. Le premier exemple concerne le choix de la ville à bombarder. Il faut savoir que Kyoto était listée parmi les sites potentiels. Mais l’opposition d’un haut placé, amoureux de ce joyau historique, a permis de retirer cette ville de la liste. On peut imaginer qu’il aurait fallu une opposition de ce type pour que d’autres cibles (moins peuplées) soient désignées. Le second exemple concerne les tests de la bombe. La BD souligne l’indifférence face à l’utilisation de cobayes humains pour mesurer les effets du plutonium. L’indifférence prévalait…
- Quatrième et dernière raison : Les États-Unis avaient déjà en ligne de mire leur prochain ennemi : l’URSS. En utilisant la bombe sur des civils, ils indiquaient à leur futur « meilleur ennemi » qu’ils étaient résolus à se battre contre tous ceux qui se mettraient en travers de leur chemin. La bombe sur Hiroshima et Nagazaki était en réalité un message pour Staline ! C’est sans doute la raison la plus importante.
Conclusion
Deux étonnements pour finir cette note de lecture :
- Le noir et blanc ne permet pas toujours de bien reconnaitre les visages.
- Ce n’est pas un livre sur la Seconde Guerre mondiale. À ce titre, les théâtres d’opérations européens sont très peu évoqués, et la Shoah n’est pas montrée.
Pour aller plus loin, j’ai été regarder quelques vidéos de cette histoire d’il y a près de 70 ans.
On peut voir le discours de Léo Szilard en anglais.
Ainsi que cette interview de Robert Oppenheimer en français.
En conclusion, c’est un ouvrage passionnant, sur une histoire qu’il faut connaître.
Voici quelques autres critiques de BD :
- Le monde sans fin.
- Cher pays de notre enfance.
- Cigarette, le dossier sans filtre.
- Capital et idéologie.
- XIII.
Oppenheimer a bien sûr gagné en visibilité auprès du grand public grâce au film du même nom.
L’incroyable histoire vraie de la bombe atomique est édité en 2020 chez Glénat. Plus de 1000 feuilles, noir et blanc, 39 euros. L’image provient du site de Glénat.
Jérôme Bondu
