J’ai lu « La Chine ou le réveil du guerrier économique » d’Ali Laïdi. Ce livre est une description de la guerre économique menée par la Chine, avec un focus dans cette seconde note de lecture sur les armes économiques chinoises. J’ai fait une synthèse du livre en trois parties :
- Le guerrier économique chinois.
- Les armes économiques chinoises.
- L’hégémonie économique chinoise.
Le livre d’Ali Laïdi est une démonstration de la volonté chinoise de devenir la première puissance économique du monde. Il détaille les rouages, étapes, vecteurs de cette volonté. Je reprends ci-dessous le plan du livre. Chaque titre est entre guillemets, tout comme les citations. J’y ajoute quelques commentaires personnels et développements spécifiques.
Armes économiques chinoises
Une face libérale, une face protectionniste
Ce chapitre est composé de trois paragraphes : « L’appât du gain plus fort que la prudence », « Double jeu ou petits arrangements avec les règles ? » et « Quand Pékin a recours à l’OMC pour protéger son marché ».
Un État stratège et combatif
– « Un président à la manœuvre. »
– « Le Conseil des affaires d’État aux manettes. »
– « Les deux bras armés du patriotisme économique : la NDRC et la Sasac ».
– « Un ministère du Commerce sur le modèle japonais : le Mofcom. » En effet le Mofcom s’inspire du MITI japonais. « Il est considéré dans son ensemble comme le service de renseignement économique le plus puissant de la planète ». Le Mofcom représente donc une des armes économiques chinoises les plus puissantes.
– « Un must dans la captation d’informations scientifiques et technologiques : le Most. » Ali explique que le Most (ministère des Sciences et Technologies) s’appuie sur l’ISTIC (Institut d’information scientifique et technique) qui brasse des millions d’informations scientifiques et techniques. Les chiffres donnent le tournis : 1,5 million de thèses nationales, 220 000 thèses étrangères, 100 000 actes de conférences … Tout cela permet un transfert de technologie vers les pôles de recherche. Nous sommes face à un système de « siphonnage des informations scientifiques ».
– « Le Front uni à l’affût des technologies occidentales ».
– « Un ministère de l’Industrie allié du complexe militaro-industriel. »
– « Les services de sécurité et de renseignements sur le front économique. » L’auteur détaille les opérations du Guoanbu, équivalent de la CIA.
– « L’armée chinoise : du business à l’intelligence économique. » L’APL (armée populaire de libération) est chargée de mener trois guerres : guerre de l’opinion publique, guerre psychologique et guerre du droit.
– « Des services de renseignements au profit de la puissance économique ».
Les experts de l’espionnage économique mondial
– « Une tradition millénaire. » Ali revient bien évidemment sur Sun Tzu et l’art de la guerre.
– « Les espions de la Chine communiste. » En fin de paragraphe, l’auteur rapporte une vieille histoire dont je n’ai jamais su si elle était vraie ou fausse. Mais Ali lui donne donc une réalité historique. Voici l’histoire : une délégation chinoise visite une usine française Agfa de Kodak en 1985. Cette délégation comporte des « espions », qui lors du passage dans un laboratoire, vont tremper leurs cravates dans les bains chimiques à disposition. Dans la version que l’on m’avait racontée, l’histoire se terminait bien. Vrai ou fausse, je vous la livre. À la fin de la visite, l’hôte français se tourne vers les espions, et explique qu’il y a une tradition très importante dans cette usine : c’est l’échange de cravate. Et avec quelques collègues, ils retirent la leur, et la donnent très respectueusement aux délégataires, qui n’avaient d’autre choix que de se plier à la coutume.
– « Première alerte sur l’espionnage chinois aux États-Unis : le rapport Cox. » Dans ce paragraphe Ali a une formule qui résume les types de hackings : « Les hackers russes cherchent de l’argent, les Américains du renseignement politique, et les Chinois des informations technologiques ». Cela me rappelle cette histoire des Anglais qui ont moqué Surcouf en disant que les Français se battent pour de l’argent alors que les Anglais se battent pour l’honneur. Ce à quoi Surcouf aurait répondu « Chacun se bat pour ce qui lui manque ».
– « Ministères, services de renseignements, entreprises publiques et privées… autant de nids d’espions ? »
– « 2018 : l’empire américain contre-attaque. » Ali rappelle qu’il est très rare qu’une affaire d’espionnage soit traduite devant les tribunaux. Le cas Huang Lili, stagiaire de Valeo en 2005 fait exception.
– « Alerte rouge en Occident. »
Infiltrés dans nos universités et nos labos
– « Des étudiants beaucoup trop curieux ». L’histoire qui suit est plus récente que celle de Lili et date de 2021. Une étudiante chinoise, beaucoup trop curieuse, s’était fait enfermer volontairement avec un ami toute une nuit dans les locaux de l’ENSAM de Metz ! On imagine bien que le batifolage de cette nuit était dans les serveurs de l’école. Elle a été renvoyée.
– « Inquiétude au Sénat français. »
– « Au Royaume-Uni, menace sur l’intégrité scientifique. »
– « L’Australie : la traque des faux étudiants. »
– « L’Allemagne renforce son expertise. »
– « Exaspération et rupture outre-Atlantique. »
– « Le Front uni du PCC surveille nos campus. »
– « L’Occident sonne la charge contre les instituts Confucius. »
Huawei, l’entreprise à abattre
– « Success-story à la chinoise. » Est-ce que copier est un délit ? Ali Laïdi donne la réponse de Kai-Fu Lee, ancien président de Google China. Pour ce dernier, le monde du business est un monde de gladiateurs où seuls les meilleurs, les plus malins survivent. Vous pourrez consulter mes deux notes de lectures des ouvrages de Kai-Fu Lee qui accrédite cette vision : La plus grande mutation de l’histoire et AI 2041. Intelligence artificielle applications possibles … )
– « Espionner les entreprises, influencer les dirigeants politiques ».
– « Au centre d’une guerre froide technologique ».
Quand la Chine arme ses lois
On découvre dans ce chapitre d’autres armes économiques chinoises.
– « Pékin copie Washington et impose ses lois à l’étranger. » « Contrairement à l’Europe, dans la guerre du droit, la Chine agit et se défend » (voir la note de lecture : Le droit, nouvelle arme de guerre économique, d’Ali Laidi ) Et le livre de Frédéric Pierucci n’y est pas passé inaperçu.
– « Vers l’instauration de lois miroirs. » Les Chinois ont donc installé des lois miroirs des lois extraterritoriales américaines. L’équivalent de l’ITAR américain et l’ECRA chinois.
– « Œil pour œil, dent pour dent : la loi anti-sanction. » Ali soulève que dans cette guerre du droit, l’Europe risque de se retrouver entre l’enclume et le marteau.
– « Transformer le citoyen en agent : la loi sur le renseignement. »
– « Touche pas à mes données ! La loi sur la cybersécurité́. »
– « Le crédit social, un outil de notation et de surveillance. » Tout le monde connait maintenant le système de crédit social, qu’Ali présente comme « une arme dans la compétition économique mondiale » (…) car cela forme un « système de surveillance total sur toutes les données des entreprises ».
– « Liste noire chinoise versus liste noire américaine. »
En conclusion de cette partie : l’Europe regarde la bataille entre la lex china et la lex americana. « Les coups pourraient tomber rapidement et faire très mal, en particulier aux multinationales européennes prises entre deux feux ».
Armes économiques chinoises
« La Chine ou le réveil du guerrier économique » d’Ali Laïdi est édité chez Acte Sud. Voir aussi la formation sur la veille géopolitique. La suite demain sur hégémonie économique chinoise.
NB : J’ai demandé à Dall.e d’imager des armes économiques chinoises … Et j’ai obtenu la première image qui illustre l’article et qui est totalement « romantique ». D’où une seconde demande pour imager la délégation chinoise qui visite une usine française Agfa de Kodak !
Jérôme Bondu