J’ai lu l’Histoire mondiale du protectionnisme, de Ali Laidi, que je recommande fortement.
Histoire mondiale du protectionnisme
C’est un ouvrage très riche, documenté, dense, sur les pratiques protectionnistes dans le monde.
Le plan est limpide :
– Les parties sont classées d’une manière chronologique : après une première partie consacrée au cadrage, on attaque une seconde partie sur l’antiquité, puis la mondialisation à partir des grandes découvertes, suivi de l’industrialisation, pour finir sur les nouveaux protectionnismes.
– Au sein de chaque partie, Ali Laïdi traite de plusieurs produits emblématiques de la période. Pour l’antiquité ce seront les céréales, le sel et le riz. Pour l’époque moderne : le sucre, le café, le cacao, et le textile. Puis pour l’époque contemporaine : les métaux, l’industrie ferroviaire, la chimie, le pétrole et les automobiles. Pour l’époque actuelle : l’aéronautique, l’électronique et l’informatique.
Armes du protectionnisme
Ali Laïdi prouve que de tout temps, pour les produits ou services essentiels, les États ont toujours utilisé l’arme du protectionnisme. Il n’y a pas d’exception, et encore moins du côté des États-Unis qui, plus que les autres, savent jouer d’un mercantilisme déguisé.
Ali Laïdi a une culture encyclopédique vraiment impressionnante. Il nous mène de la maîtrise du blé aux technologies modernes. Il retrace le parcours de multiples entreprises, ayant grandi entre protectionnisme et libre-échange. L’auteur retrace par exemple les débuts d’Alstom (contraction d’Alsace et Thomson), entreprise qu’il connait bien pour l’avoir analysé dans son ouvrage « Le droit comme arme de guerre économique ». (voir aussi le compte rendu de la conférence à l’IHEDN sur le sujet et la conférence sur l’EPGE). Il égratigne au passage la Commission européenne qui a empêché la fusion Alstom Siemens au nom de la saine concurrence … sans se soucier que pendant ce temps-là Chine construisait un champion international.
Ali Laïdi explique comment les États-Unis se sont prémunis du premier choc pétrolier en concluant avec l’Arabie Saoudite un accord pour que les Saoudiens investissent leurs pétrodollars sur les places américaines et achètent ensuite des produits made in America. Ce qui a fortement amorti le choc chez eux.
Échecs et réussites du protectionnisme
Il rappelle l’épopée de Bull, l’échec d’Unidata, et les débuts de l’informatique en Europe. Il estime que déjà là, les Européens « n’aiment pas faire des affaires ensemble » et sont tentés de partir vers le grand large en ordre dispersé.
Parmi les pages passionnantes, il y a celles qui présentent le rôle de la culture, les accords Blum-Byrnes, l’exception culturelle française, le poids du soft power américain.
Ces quelques lignes ne reflètent qu’un pour cent du livre tant il est riche. Ali Laïdi avait déjà montré sa maîtrise de l’Histoire avec l’Histoire mondiale du protectionnisme ! Ce livre en est une sorte de continuation logique … C’est à lire !
Preuve de la qualité de l’ouvrage, Ali a reçu à Berçy le Prix du Livre d’économie 2022. Bravo !!
Autres références sur le protectionnisme
Voir aussi :
– Vidéo de la conférence d’Ali Laïdi au Club IES sur l’histoire de la guerre mondiale économique.
– A lire : Le droit comme arme de guerre économique.
– L’animation par Ali Laïdi de la conférence d’Alain Juillet et moi-même à l’École Militaire.
– Mon interview par Ali Laïdi dans le journal de l’intelligence économique sur France 24.
– Profil de Ali Laïdi sur Linkedin.
Jérôme Bondu