Comment détecter les fake news ? Voici un second compte rendu informel de la table ronde « Evaluer la fiabilité de l’information et mieux détecter les fake news » sur I-expo 2022. Un premier compte rendu fait état de la table ronde « Maîtriser l’information dans un monde incertain ».
Détecter les fake news
La table ronde est animée par Thibault Renard, de l’Observatoire de l’Intelligence économique, Astec, Cybercercle. Avec les interventions de :
– Frédéric Tomas, Enseignant-chercheur, Tilburg University
– Vincent Claveau, Chercheur, IRISA-CNRS
– Ramon Ruti, co-founder & CTO, Storyzy
– Laurent Cordonnier, Fondation Descartes des manipulations de l’information, Observatoire Paris 2
Quelles différences entre mensonge et fake news ? Frédéric Tomas introduit le sujet et rappelle qu’un mensonge implique plusieurs éléments : un menteur, une vérité à modifier, quelqu’un pour croire le mensonge, et une capacité de transmission. Il y a toujours une intentionnalité dans la diffusion d’un mensonge. A contrario, une infox n’est pas toujours intentionnelle, donc n’est pas toujours à ranger dans la catégorie « mensonge » au sens propre.
Détecter les personnes de confiance
Pourquoi les infox se diffusent-elles ? Une partie de l’explication réside dans le fait que nous sommes tous dépendants des autres au niveau informationnel : « nous savons par délégation ». Tout analyser tout le temps serait beaucoup trop couteux au niveau cognitif. Cette délégation repose sur un lien de confiance. Toute la difficulté repose donc dans notre calibrage de ce lien de confiance avec les autres.
Ce n’est pas simple. On pense tous que nos sources sont bonnes. Personne n’aime être dupe d’une fausse information. Nous avons été câblés pour accorder notre confiance selon certains critères. La remise en cause de ces critères génère un coût cognitif. Même les enfants sont précablés. Nous en avons eu plusieurs exemples :
– Dès l’âge de 3 ans, les enfants accordent plus confiance à un éducateur qui ne s’est jamais trompé (contre d’autres qui se sont déjà trompés).
– D’autres tests sur des enfants montrent qu’ils accordent plus de confiance envers une personne quand elle a les mêmes goûts, le même accent, ou d’autres critères qui peuvent paraitre subjectifs… On accorde plus de confiance à ceux qui nous ressemblent.
Il faut donc comprendre ces critères pour les adapter intelligemment (critères épistémiques). Cela rejoint l’invitation de Gérald Bronner à connaître la cartographie de nos biais cognitifs.
Individualisme épistémique
Nous voyons dans la période actuelle un regain d’individualisme épistémique. Cela se caractérise par :
– Une volonté de rechercher par soi-même.
– Un rejet des explications officielles.
– Et cela va de pair avec une adhésion aux théories du complot. D’où la question : quand dois-je faire preuve d’esprit critique. Quand puis-je me fier aux informations que je reçois. Le curseur est difficile à placer. Si ce travail recèle une dimension humaine (d’analyse) il peut y avoir une aide informatique.
Détecter les fake news
Le scandale des couveuses ne pourrait plus avoir lieu aujourd’hui. Les grossières manipulations d’État seraient maintenant détectées par la population civile. Une partie d’entre elles a adopté les outils de l’OSINT. L’exemple de Belling cat est le plus connu.
Le domaine scientifique n’est pas épargné. En France le niveau de littératie scientifique est faible, ce qui en fait un terrain fertile de propagation des infox.
En conclusion : cette table ronde était passionnante. Je vais inviter Frédéric Tomas et Laurent Cordonier au Club IES fin 2022 ou début 2023. N’hésitez pas à consulter le planning des prochaines conférences. La réunion d’avril portera sur la géopolitique de la Chine. N’hésitez pas à consulter le programme de formation en veille et intelligence économique.
Jérôme Bondu