Suite à la conférence de M. Alaoui sur le développement de l’intelligence économique au Maroc, Damien Poincloux, qui a assisté à la conférence, m’a proposé sa vision du développement de l’intelligence économique en Tunisie. Pays dans lequel il a eu l’occasion de faire un stage en intelligence économique récemment. Je lui laisse donc la parole.
Jérôme Bondu
Intelligence économique en Tunisie
Suite à l’intéressante intervention de M. Alaoui sur « l’Intelligence économique et Maroc », je me permets de vous envoyer ces quelques remarques.
Nous pouvons voir que l’intelligence économique retient l’attention d’un nombre grandissant de pays, notamment en voie de développement économique. Mais si le royaume chérifien l’a mis en place depuis longtemps, ce n’est pas le cas de tous, notamment de la Tunisie.
M’intéressant à l’économie maghrébine et ayant eu l’occasion d’effectuer un long séjour en Tunisie, j’ai pu y observer la place de l’intelligence économique.
Intérêt tardif pour l’intelligence économique en Tunisie
Les premiers indicateurs d’intérêt (visibles) semblent remonter à début 2008. Pourquoi si tardivement ?
On peut hasarder que l’orientation de l’industrie vers la sous-traitance, le tourisme low-cost et les financements internationaux, aient freiné l’adoption d’une gestion proactive des informations !
L’intérêt qui apparaît dans les institutions publiques est souvent poussé par des représentants de celles-ci à titre individuel. Comme il m’a été donné de voir au sein du Cepex, institution devant conseiller et accompagner les entrepreneurs tunisiens sur les marchés extérieurs.
En outre, dans un pays où l’Etat « assiste beaucoup », payer un service reste difficile et implique une culture du changement.
Et puis comme en France, il y a une interrogation sur le « retour sur investissement » de la démarche.
Les besoins sont néanmoins réels
Il y a eu un exemple récent du manque de veille stratégique et de prospective au niveau de l’agriculture. La Tunisie comme ses voisins algérien et marocain investit beaucoup sur l’agriculture pour développer son économie. Et lors d’une conférence, les représentants européens ont indiqué au public tunisien que des accords avaient été signés avec l’Égypte, et que la Tunisie pourrait effectuer les mêmes démarches. Le problème est que l’Égypte, économie concurrente, prend une longueur d’avance, et surprend les Tunisiens.
Les changements concernant l’intelligence économique en Tunisie
Je n’ai pas détecté beaucoup de structures ayant mis en place une dynamique de veille. Toutefois, l’intérêt pour le sujet existe désormais, et ceci à tous les niveaux : que ce soit universitaire, au niveau privé (au sein de l’Institut Arabe des Chefs d’Entreprise ou l’Ordre des Experts Comptables), ou au niveau public, notamment territorial (CCI de Tunis…).
Le choix de se replacer dans le marché mondial, fait naître de nouveaux besoins en intelligence économique afin de se mettre en position de prévoir de nouvelles opportunités, d’élargir ses champs d’action, de créer un nouvel élan de croissance.
Comme pour le Maroc, il y a un travail d’adaptation de l’intelligence économique à la Tunisie, à ses besoins, objectifs et culture entrepreneuriale.
Un exemple d’appropriation
Suite à « la crise des subprimes », la Banque de Tunisie a mis en place une structure d’intelligence économique, pour anticiper les éventuels futurs décrochages des marchés financiers. L’initiative est intéressante, même si le marché financier tunisien n’est pas complètement intégré au marché financier mondial, donc peu sujet aux dérives. Cette cellule pourra être utile par exemple pour détecter de nouveaux placements à des investisseurs refroidis par les erreurs de monde boursier.
Rôle de la France dans le développement de l’intelligence économique en Tunisie
Lors d’un séminaire, une question concrète fut posée concernant l’appui possible de la France pour la mise en place de l’intelligence économique en Tunisie. Comme le Maroc, la Tunisie cherche à s’inspirer des travaux initiaux menés en France sur le sujet.
Des séminaires sur les outils disponibles (outils de veille) ont été organisés, mais semblent plus ouverts à des acteurs européens qu’aux acteurs économiques Tunisiens.
Comment adapter au mieux l’intelligence économique à la culture de l’information en Tunisie ? La France a certainement un rôle à jouer en apportant un savoir faire dans le cadre d’une « coopétition » (coopération … compétition) intelligente !
Damien Poincloux
Pour en savoir plus sur l’intelligence économique tunisienne et au-delà
- L’intelligence économique tunisienne.
- Lire le compte-rendu de la conférence sur l’intelligence économique au Maroc.
- Lire l’article sur l’intelligence économique au Maroc.
- Voir les interventions de Monsieur Abdelmalik Alaoui sur l’intelligence économique au Maroc.
- Lire l’article sur l’intelligence économique en Algérie.
- Compte-rendu du festival d’intelligence économique francophone.