Le compte rendu du colloque « Savoirs & Innovation – Innover dans le savoir et savoir pour innover » est disponible. Vous pourrez y lire ma modeste contribution sur un panorama des outils de veille. Je présente trois idées importantes.
– La première est que nous vivons une époque extraordinaire comme le monde n’en a connu que cinq.
– La seconde est que pour tirer le meilleur profit de ce que nous sommes en train de vivre, il est important de maîtriser certains outils.
– La troisième est que ces outils posent certains problèmes, ils sont à « double tranchant ».
Lire le PDF ici. Lire le programme. Et ci-dessous la présentation de ma conférence.
Jérôme Bondu
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Panorama des outils de veille
Je souhaite vous transmettre trois idées-forces. La première est que nous vivons une époque extraordinaire comme le monde n’en a connu que cinq. La seconde est que pour tirer le meilleur profit de ce que nous sommes en train de vivre, il est important de maîtriser certains outils. La troisième est que ces outils posent certains problèmes, ils sont à « double tranchant ».
Nous avons connu cinq révolutions informationnelles.
La première a vu les hominidés acquérir un langage articulé et récursif. Ce qui a permis un partage extraordinaire du savoir entre nos lointains ancêtres. La seconde a vu l’Homme inventer l’écriture. Ce qui a permis l’éclosion de la Civilisation. La troisième a vu l’invention de l’imprimerie. On lui doit le « paysage » européen de l’époque moderne avec ses bouleversements industriels, sociaux (révolution française), culturels (protestantisme), … Lors de la quatrième, nous sommes devenus capables de transporter le son et l’image. Enfin, nous sommes dans la cinquième révolution informationnelle, celle issue de l’émergence d’internet et de la numérisation des données. Mais attention, cette révolution ne consiste pas tant dans la diffusion des savoirs (comme on l’entend souvent à tort), mais dans la démocratisation de l’expression.
Données informationnelles, informations et renseignements
Pour bien percevoir les enjeux de cette révolution numérique, il convient de bien distinguer les « données informationnelles », des « informations » et des « renseignements ». Les premières (données) ne sont pas exploitables et sont généralement vite oubliées. Les secondes (informations) ont du sens pour celui qui les reçoit. Mais seules les dernières (renseignements) permettent d’agir. La transformation d’une donnée en un renseignement est une alchimie intérieure. Cela demande une capacité d’analyse. À l’aune de ce distinguo, on peut se rendre compte qu’internet charrie surtout des données. Internet met à votre disposition. Mais c’est à vous d’en extraire ce qui peut servir de renseignement. D’où l’importance d’avoir à sa disposition des « outils » pour pouvoir faciliter ce travail de transformation.
Moteur de recherche
Quels outils ? La porte d’entrée d’Internet est le moteur de recherche. Plus de 90% des requêtes en France sont composées sur Google. Intéressons-nous à cet outil. On sait qu’une interrogation basique renvoie un nombre ingérable de données. Le premier des outils à maîtriser est donc le moteur de recherche. La bonne requête est celle qui s’écrit avec des opérateurs (par exemple AND OR NOT « . » intitle :filetype: site:…). Cela est essentiel, mais ce n’est pas tout. Autre outil : Google Custom Search qui permet d’interroger des sites « qualifiés ». Continuons avec la veille : il est aussi important de savoir agréger des flux pertinents d’informations, de créer des flux RSS à partir de sites qui n’en proposent pas, de les filtrer, de mettre sous surveillance des médias sociaux. La maîtrise de ces outils est simple, et doit être enseignée à tous. C’est le nouvel alphabet du XXIème siècle.
Nouvelles pathologies
Pour finir ce panorama, il convient de tirer la sonnette d’alarme sur les nouvelles pathologies que cette révolution informationnelle peut engendrer. Premier enjeu : changer notre vision. Nous n’avons pas encore changé notre façon d’agir par rapport à l’époque où l’information était difficile à acquérir. Le grand défi de l’époque à venir n’est pas de collecter, mais de se protéger, de savoir filtrer les données pour n’en recevoir que l’écume utile. Deuxième enjeu : savoir nous protéger, et sauvegarder notre indépendance informationnelle. Le monopole de Google pose un problème immense, car en l’interrogeant sans cesse, on lui confie nos « questions ». Et il répond. Il est une sorte de « big brother » consentie et acceptée. Par ses réponses, et sa connaissance des internautes, il a de quoi changer notre perception de notre environnement, de notre passé et de notre futur. Comme le dit l’aphorisme « le poison est dans la dose ». Le problème de Google réside dans sa trop bonne connaissance des internautes, et dans notre dépendance trop forte à ses réponses. Il est important que l’Europe crée un moteur de recherche européen, sans quoi notre avenir en tant qu’entité culturelle et politique sera compromis en l’espace d’un ou deux générations.
En conclusion de cette courte réflexion sur un panorama des outils de veille, il faut rappeler que vivons une période extraordinaire, mais qui nécessite que nous soyons outillés, si nous voulons en garder le contrôle.
Jérôme Bondu
