Quand on lance un filet à la mer, même avec des mailles calibrées, on a toujours des surprises sur ce que l’on va attraper. Ma veille thématique m’a réservé une réelle surprise avec cet article : « Facebook appartient il à la CIA ? » publié par Ernesto Carmona dans Altermonde-sans-Frontières. Le titre est plutôt accrocheur posant une réelle problématique en terme de sécurité questionnant l’appartenance de Facebook à la CIA.
Facebook CIA ?
Le chapeau de l’article donne le ton « Les grands médias ont célébré Mark Zuckerberg comme l’enfant prodige qui, à l’âge de 23 ans, s’est transformé en milliardaire multimillionnaire grâce au succès de Facebook, mais ils n’ont pas prêté attention à l’investissement de capital -risque? de plus de 40 millions de dollars effectué par la CIA pour développer le réseau social… »
L’auteur donne un certain nombre de références. Il cite notamment un article de Tom Hodgkinson paru dans The Guardian qui visiblement n’aime pas du tout Facebook (14 janvier 2008). J’ai recherché d’autres références. Un article publié dans Agoravox va dans le même sens (18 décembre 2007).
J’avais moi-même relayé (septembre 2007) une information issue d’Intelligence On Line (source pour le coup plutôt sérieuse n°553) qui révélait que le renseignement américain voulait intégrer le web 2.0. à ses outils de travail, et se tourne vers des entreprises privées pour monter leur système.
Logique de compilation
Derrière cette volonté apparente de captation des profils des réseaux sociaux, on retrouve bien la « logique de compilation » qu’Alain Bauer a expliqué dans son ouvrage « Le nouveau chaos mondial ». Il décrit la pratique américaine de « compilation », qui consiste à essayer de tout capter et de tout enregistrer (voir le réseau Echelon).
En quoi Facebook pourra-t-il aider la CIA ? Car il est certains que leurs cibles ne vont pas utiliser ces outils ! Sans être le moins du monde un spécialiste de la question, on peut supputer quelques explications.
Comment le réseau social pourrait être une aide pour la CIA ?
– Il y a probablement l’envie de ne pas passer à côté d’une opportunité, même si on ne sait pas très bien sur quoi cela va déboucher.
– Il a aussi certainement l’espérance de prendre quand même des poissons dans ces filets. On peut très bien imaginer qu’un ado ait son profil sur Facebook, avant qu’adulte, il ne change de « philosophie », ? mais ne puisse pas effacer ces traces numériques. D’ailleurs sa « conversion » sera sans doute visible sur le réseau, avant qu’il cesse d’alimenter son profil. A ce titre Facebook a clairement indiqué qu’aucun profil ne serait supprimé (même après le décès du « profil »).
Intérêt stratégique de Facebook
– Et il y a enfin (évidemment) des stratégies plus complexes. Je reviens aux auteurs cités plus haut, qui expliquent qu’un des obstacles à la logique de compilation des noms réside dans l’impossibilité « d’enregistrer le nom d’un individu issu d’une société traditionnelle, à l’orthographe incertaine, au lieu de naissance incertain, au lieu de résidence changeant, et à la filiation flottante. ». Si vraiment la CIA a un intérêt stratégique dans le développement des réseaux sociaux, il faut voir loin. Ces outils ont des vertus normalisatrices. Notamment au niveau des dénominations des personnes. C’est sans doute un des effets induits attendus. En figeant l’orthographe des noms en caractères latins, pas des terroristes, mais de leurs entourages, il y a certainement la volonté de figer des éléments qui permettront un enregistrement plus fiable.
– Dernier point. Derrière cette prise de participation si visible (car elle aurait pu certainement être faite de manière beaucoup plus discrète) il y a aussi sans doute l’intention de détourner l’attention d’autres investissements plus « stratégiques ». Comme quoi, dans ces domaines, on peut tout imaginer.
Jérôme Bondu
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