Quelques lignes pour rendre compte du colloque organisé le 19 mars 2010 par les étudiants du « Master 1 commerce international » de Paris XI sur le thème « réseaux sociaux et le monde politique« . J’ai eu le plaisir d’y intervenir à deux reprises, pour une conférence, et pour l’animation d’une table ronde sur les « réseaux sociaux & la politique ».
Il va sans dire que ce compte rendu est informel, et que les lignes qui suivent n’engagent que moi.
Les réseaux sociaux et le monde politique
Le colloque a été ouvert par Jean-François Gervais qui est intervenu pour présenter les nouvelles tendances du web. Je suis ensuite intervenu sur les « menaces et opportunités des réseaux sociaux ». Thierry Crouzet (auteur notamment du « Peuple des connecteurs » et du « Cinquième pouvoir ») a ensuite traité le sujet : « Les réseaux sociaux sont-ils révolutionnaires ? »
Le titre de la table ronde était « les avantages et inconvénients des réseaux sociaux pour le monde politique & le militantisme via les réseaux sociaux ». Sont intervenus : Thierry Crouzet, Philippe Mouricou, enseignant-chercheur, élu PS du 15ème arrondissement de Paris, et Romain Pigenel, enseignant-chercheur. M. Valerio Motta, responsable web du PS, s’est excusé et a diffusé une vidéo. Cette surreprésentation des socialistes n’était pas due à une anticipation du résultat des élections régionales. Les organisateurs ont expliqué qu’aucun des représentants de l’UMP contactés n’a donné suite.
Difficile appropriation des outils 2.0 par le monde politique
Parmi les nombreuses idées échangées, j’ai retenu que l’élection d’Obama a été une première dans l’utilisation des outils participatifs, et dont le véritable maitre d’œuvre était Howard Dean. Mis à part Mme Royal, qui s’en est fortement inspiré lors de l’élection présidentielle de 2007, les politiques français n’ont pas été très actifs dans l’appropriation des outils 2.0. Ils sont plutôt suiveurs en la matière. S’il le leader d’un parti est convaincu, les décisions peuvent aller très vite. Mais en France il n’y a pas de liens directs entre les directions des partis et les spécialistes d’internet. En outre, rappelle un des intervenants, il faut éviter d’être dans la réplication. Internet est un domaine où il faut essayer d’avoir un coup d’avance.
Les outils participatifs peuvent améliorer l’organisation militante en donnant un pouvoir d’action et d’organisation à la base. Cela facilite le travail de militantisme sur le terrain. À cet égard, ces outils seront certainement au centre de la mobilisation pour 2012.
Peur de perdre le contrôle des militants sur les réseaux sociaux
Les partis politiques sont maintenant convaincus de l’utilité des outils sociaux, et veulent les utiliser. Mais ils « craignent » de perdre le contrôle des militants. Ils ont une préférence pour des outils centralisés. Par exemple, Ségolène Royal a bien utilisé la vague participative pour se faire porter en tant que représentante du PS à la dernière élection présidentielle. Par contre, une fois investie, elle a utilisé ces mêmes outils pour « diriger » et non plus pour faire de la remontée d’informations. Elle est passée du « bottom up » au « top down ». La logique d’internet est très différente de la logique du chef.
En outre, une utilisation extensive des remontées terrain peut aussi être mal interprétée dans un pays centralisateur comme le nôtre. Ainsi, on a pu « entendre » durant l’élection de 2007 que si Ségolène Royal construisait son programme à partir des citoyens, c’est uniquement parce qu’elle n’avait pas d’idées !
Préférence du monde politique pour des outils centralisés
La préférence des partis envers des outils centralisés, explique qu’ils aient créé leurs propres réseaux, plutôt que de se greffer sur des réseaux existants. Ainsi l’UMP a investi environ 500 000 euros dans le réseau « Les créateurs de possibles ». Le PS a investi lui 300 000 euros dans la « Coopol » (Coopérative Politique) qui compte 25 000 membres. Ce qui fait dire aux invités que ces coûts faramineux ressemblent à une « course aux armements ». C’est au parti qui investira le plus ! D’ailleurs, relève l’un des intervenants, le chef d’un parti minoritaire s’est presque excusé récemment lors d’une interview de n’avoir pas les fonds nécessaires pour développer son propre réseau social !
Si l’on regarde en détail les deux réseaux sociaux des deux grands partis français, on perçoit des différences fondamentales. « Les créateurs de possibles » (voir une vidéo de promotion sur DailyMotion) est un outil pour fédérer des sympathisants, pour élargir la base électorale. Il est tourné vers l’extérieur. Coopol, est plutôt un outil d’organisation interne.
Pas d’outil de veille sur les réseaux sociaux
J’ai bien sûr interrogé les invités sur la pratique de la veille. Il en ressort qu’il n’y a pas d’utilisation d’outil de veille professionnel pour détecter les contributions pertinentes.
La pratique numérique des politiques passionne les journalistes, qui n’ont pas hésité à en faire des gros titres. Ainsi, quand le profil d’Anne Hidalgo a été repéré sur Facebook, elle a été fortement sollicitée pour faire des démonstrations devant des journalistes.
Thierry Crouzet a élargi le débat sur les blogs et le rôle des journalistes, en affirmant que si l’on analyse la rémunération des journalistes français, on s’apercevrait que leur salaire vient en grande partie de subventions de l’État, et donc de nos impôts. Le modèle économique est à revoir.
A la dernière question, sur la place des outils en 2012, tous sont tombés d’accord pour dire que les réseaux sociaux auront certainement une place centrale. Cependant il est impossible de dire quel type d’outil sera en vogue. « Cela va trop vite » a dit l’un d’entre eux, et en deux ans, il peut très bien naître un nouvel outil « indispensable ». Si l’on veut imaginer ce qu’il sera, on peut supputer que le prochain outil alliera puissance des flux, et portabilité du terminal de lecture.
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Jérôme Bondu
NB : colloque réalisé par des étudiants en Master 1 commerce international, à la Faculté Jean Monnet de Sceaux (Paris 11)